Afrique du Sud : la polyandrie au cœur du débat
À l’heure où le droit des femmes est l’un des combats les plus controversés tout en étant l’un des plus relayés, en Afrique du Sud, la polyandrie met le feu aux poudres.
Environ 30 pays autorisent à ce jour la polygamie. Parmi eux, 25 sont des pays africains, et l’Afrique du Sud en fait partie. Pourtant, on a trop souvent tendance à omettre l’existence de deux formes de polygamie : la polygynie et la polyandrie.
QUAND LE PATRIARCAT ET LE DROIT DES FEMMES JUSTIFIENT L’IGNORANCE DE LA POLYANDRIE
Si la polygamie est en Afrique du Sud un des sujets les plus banals qui soient, c’est parce qu’elle ne prend seulement en compte la polygynie, soit, la relation entre un mari et ses femmes. La polyandrie qui concerne la relation qu’entretient la femme avec ses époux, elle, est sujet à polémique.
L’Afrique du Sud est à ce jour un des pays d’Afrique et du monde ayant la constitution la plus libérale qui soit. Preuve en est : en 2006, le pays légalise les mariages homosexuels. Puis quelques années plus tard, la banalisation de la multiplicité des mariages par l’ancien président du pays, Jacob Zumba, qu’ils soient d’ordre culturel, religieux ou autres. La polygamie et plus exactement la polygynie devient ainsi ordinaire. Enfin récemment, en 2021, l’autorisation de participation des personnes transgenres à la cérémonie de Miss Afrique du Sud vient allonger la liste.
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Cependant, l’expansion de ces pratiques reste sujette à d’incessants débats. En effet, bien que le territoire se diffère des autres pays africains par l’acceptation des droits individuels et de la différence, la lutte pour les libertés semble sans fin. D’autant que la polyandrie a inconsciemment fait émerger la question du patriarcat.
Charlene May, avocate au Women’s Legal Centre se révolte : « Nous ne pouvons pas rejeter la réforme du droit parce qu’elle remet en cause certains points de vue patriarcaux dans notre société ». Le cabinet d’avocats au sein duquel elle exerce défend les droits des femmes, et ce, notamment dans le but de contrer l’idée selon laquelle le rôle d’une femme ne réside pas dans le fait d’avoir la supériorité sur les hommes.

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Le sujet de l’insertion de la polyandrie au sein de la constitution sud-africaine suscite aujourd’hui la discorde. Dans cette société où l’égalité est indéniable, on comprend que la maîtrise du couple par la femme pose problème. Non pas parce qu’elle n’en est pas capable, mais bel et bien parce que cette composition amoureuse ne correspond pas au modèle sociétal.
LA POLYANDRIE MATIERE À POLEMIQUE
Toutes les excuses sont bonnes pour contrecarrer ce projet de loi. Musa Mseleku fait partie de ceux pour qui l’initiative semble tout bonnement absurde. Avec quatre maisons, quatre femmes et dix enfants, il est évident que la polyandrie sonne faux pour cet homme d’affaires et personnage public.

Polygamist Musa Mseleku on being a father – ‘I have 10 children but I think I am underperforming’ | Drum
« Cela va détruire la culture africaine. Qu’en est-il des enfants de ces personnes ? Comment connaîtront-ils leur identité ? », se questionne la célébrité sud-africaine. Selon lui, la polyandrie est comme une atteinte à la tradition polygamique africaine qui place l’homme à la tête de cette union. À l’instar de nombreux projets de lois, la polyandrie suscite le questionnement d’une grande partie des Sud-Africains.
Quel nom de famille attribuer à un enfant dont la propre mère a le choix entre plusieurs noms ? Aura-t-elle le rôle de transmission du nom ou bien gardera-t-elle son nom de jeune fille ? La dot aura-t-elle sa place pour une femme dont les maris sont multiples ? Autant de questions qui viennent alimenter la remise en question de cette pratique.
La polyandrie est d’ores et déjà d’actualité dans plusieurs régions d’Afrique du Sud. De manière officieuse puisqu’elle n’est pas reconnue comme un mariage règlementaire dans le pays. Ajouté à cela le fait que l’opinion de la population d’Afrique du Sud est particulièrement impactant, au sein d’une nation plus que jamais progressiste.
