Décidément les réseaux sociaux sont devenus l’espace de tous les débats ainsi que de celui de toutes les moqueries ! L’une des moqueries à la mode, ces derniers temps: exposer des photos d’Africain-e-s vivant sur le continent, dans des poses et/ou tenues improbables, parfois dans des situations ubuesques dans la vie quotidienne ou professionnelle. Tous les pays y passent, du Nord au Sud et de l’Est à l’Ouest. Des constructions hasardeuses qui ne correspondent pas au plan de l’architecte en Afrique du Nord, à la sape incertaine agrémentée d’une pose aussi improbable en Afrique centrale.
On en rigole, on partage les postes, on les commente… Néanmoins, on reste admiratif face à l’audace et la créativité artistiques de leurs auteurs. Certains d’entre nous y perçoivent le génie du « système D » africain, d’autres y voient un flagrant délit de mauvais goût, un manque de professionnalisme et d’autres encore, une manière de se faire plaisir avec les moyens du bord.
Et pourquoi pas se faire plaisir avec les moyens du bord !
Car on le sait, nos capitales africaines ne sont pas toutes à l’image des plus belles capitales du monde avec leurs belles avenues, édifices ou palaces (où bon nombre de nos dirigeants préfère loger). Et tout le monde n’a pas les moyens d’aller dans les plus belles places de la capitale de son pays pour y faire des photos mythiques. Nos villes et nos villages ne sont pas assez valorisés pour permettre à nos frères et nos sœurs d’y poser fièrement, avec en arrière plan, nos constructions ancestrales superbement éclairées et/ou aménagées.
On se moque, mais dans le fond, notre cerveau occidentalisé est saturé de photos sur papier glacé, d’affiches publicitaires ou de films stéréotypés sur l’image qu’on se doit de véhiculer.
Que faire donc ? Devons-nous envoyer toutes ces photos à nos autorités pour qu’enfin ils comprennent le désarroi de cette jeunesse qui est obligée de faire des photos montage bidon sur Photoshop ou prendre des poses improbables dans le but de “laisser une trace à leurs progénitures” (imaginez un peu le désarroi de leurs enfants quand ils verront les photos de son père et sa mère dans quelques années !)
Au-delà de nos moqueries ou de notre « blédarophobie » (tendance à se moquer de tout ce qui vient du « bled »), nous devons faire preuve d’empathie et nous dire que dans un monde de plus en plus connecté, il nous faudra être de plus en plus tolérant. Au-delà de cette tolérance, nous devons comprendre que le « système D » ne se limite pas aux bricolages du dimanche mais aussi à la création artistique avec les moyens du bord pour immortaliser un moment particulier.
Vive le Bled et à quand la #blédophilie en guise de soutien ?