Les designers sénégalaises Joëlle Le Bussy Fall et Sadiya Guèye ont plaidé mercredi dernier à Dakar pour une plus grande valorisation de leur domaine d’activité. Elles ont profité de leur invitation à rendre compte de la place du design dans le pays afin de défendre leur cause.

Bien que ces branches comptent parmi les plus dynamiques des industries culturelles, “L’accent n’est pas mis sur la valorisation du ’made in Sénégal’”, tranche Joëlle Le Bussy Fall, chargée de cours de design à l’Université Gaston-Berger de Saint-Louis et fondatrice de la galerie “Arte”.
“Il faut que l’on fasse quelque chose sur les métiers d’art, la valorisation et la transmission”, poursuit-elle au cours de son intervention lors d’un séminaire de recherches sur les politiques culturelles au Sénégal.
Cette rencontre, organisée au musée d’art africain Théodore-Monod, était à l’initiative de la direction chargée des Arts au ministère sénégalais de la Culture.
Pour elle, construire plus de fondations et de structures de formation par lesquelles se transmettrait le savoir-faire acquis de génération en génération est indispensable. Dans un but de sensibilisation et de notoriété d’un secteur d’activité plein de ressources, ces constructions seront lieux de valorisation de l’artisanat, des beaux-arts et des arts appliqués.
“Il est en effet urgent que le savoir-faire de nos artisans soit enfin réellement pris en compte par l’Etat, ainsi que la redéfinition d’un nouveau langage esthétique”, affirme Joëlle Le Bussy Fall.
En vertu des propos de la fondatrice de la galerie “Arte”, “il n’y aura pas de développement du design sans une petite niche réservée à une certaine
élite”, tant que les artisans seront mis en marge de toute reconnaissance.
Poursuivant par l’énumération de designers sénégalais en vogue dont Ousmane Mbaye (mobilier) et Aïssa Dione (textile), elle dénonce le fait que le design sénégalais ne soit pas identifié comme un secteur économique alors qu’il est très prisé à l’extérieur du pays.

Quant à Sadiya Guèye, la styliste propose que les actions diplomatiques du Sénégal offrent une vitrine à la créativité et à la mode
“De cette manière, les métiers liés au design seront mieux valorisés”, a-t-elle estimé.
Elle a insisté sur “les nombreux problèmes de la mode sénégalaise, un secteur très informel à 99 %” qui est, selon elle, imprégné de laxisme. “On parle de mode africaine ou de pagne africain, mais les matières ne sont pas africaines, car il n’y a pas d’usines de textile”.
Cette remarque pertinente soulève une question très importante: le design africain que les gens prennent sans payer de droits (motifs etc), comment faire pour qu’ils reviennent à l’Afrique ?
Evoquant la question de la propriété intellectuelle, la fondatrice du “Complexe Sadiya” déclare que “la mode sénégalaise est copiée partout, surtout dans la sous-région”.
Le fléau de la copie est difficile à contrer compte tenu des moyens de protection onéreux.
Le parcours de reconnaissance du design africain parait semé d’embuches mais prometteur.