Vendredi 8 février 2019, Libération par l’intermédiaire de CheckNews a publié sur son site internet un article intitulé “La Ligue du LOL a-t-elle vraiment existé et harcelé des féministes sur les réseaux sociaux ?”. Très rapidement les témoignages ont déferlé.
Les réseaux sociaux sont un monde impitoyable où les carrières se font et se défont aussi vite qu’il faut pour écrire 280 caractères d’un tweet assassin. Vendredi 8 février, CheckNews, un moteur de recherche tenu par des journalistes de Libé qui répondent aux questions après enquête, a publié la réponse à la question “La Ligue du LOL a-t-elle vraiment existé et harcelé des féministes sur les réseaux sociaux ?”. Bien que la réponse, affirmative, soit sans appel, l’article provoque une assez vive insatisfaction.
UN SECRET DE POLICHINELLE
L’existence de la Ligue du LOL est manifestement un secret de Polichinelle. Il s’agit d’un groupe privé facebook créé par Vincent GLAD (journaliste à Libération) rassemblant la crème de la crème des jeunes journalistes. Il apparaît vers 2013 et produit de l’humour noir, cynique, du harcèlement en groupe et du harcèlement sexuel. Michel Henry qui reconnait avoir fait brièvement parti de ce groupe, témoigne dans l’article de Libé que le but était “surtout [de faire] des blagues, qu’on ne pouvait pas faire en public. C’était brillant, c’était bête, il y avait ce côté observatoire des personnages de Twitter, on s’échangeait des liens, des photos, on se moquait des gens”. Les témoignages inondent les réseaux sociaux depuis 48H.
Après des années sans compte Twitter, je sors du silence pour un thread sur la #liguedulol dont j’ai aussi été victime. Explications.
— capucine piot (@capucinepiot2) 8 février 2019
À l’heure où l’afroféminisme est devenu relativement acceptable, la journaliste Mélanie Wanga témoigne, elle aussi, de son propre harcèlement : “Dans mon cas c’est surtout l’amoncellement, le travail de sape sur plusieurs mois et années de tweets sexistes et racistes qui pèse … C’était du genre “Quand on lit la timeline de @melaniewanga, ça donne envie d’adhérer au Ku Klux Klan”.
La Ligue du LOL, c’est ce qui m’a poussée à quitter cette appli en 2013. C’est quoi ? A l’époque, une team de fringants journalistes qui s’adonnaient au harcèlement comme à un sport, avec pour cibles des féministes, des personnes LGBTQ et racisées. https://t.co/bp9cB9gViG
— Mélanie Wanga (@babymelaw) 8 février 2019
Pour la journaliste qui depuis a rebondi en créant son propre Podcast, Le Tchip, elle considère que ce harcèlement a eu des conséquences directes sur sa carrière. “Si j’ai quitté Twitter en 2013, c’est complètement à cause des loleurs. Et c’est pas anodin pour une journaliste de ne pas être sur ce réseau de l’information instantanée. Maintenant, ça sort les mouchoirs, mais à l’époque, quand je pleurais devant mon ordinateur, quand je les croisais en soirée et que j’avais peur de me faire humilier, ou que je voyais d’autres féministes se faire insulter, et dénigrer “dans la rigolade” (en me disant, tristement, “ouf c’est pas moi”) par ces jeunes journalistes hype dans le vent… il n’y avait pas de pitié émanant de leur part”. Et elle ajoute : “Après en termes bruts, je n’ai jamais voulu bosser dans certains médias (Libé, Les Inrocks ou Slate) parce que je savais que ces types sévissaient là-bas”. La journaliste témoigne d’une auto-censure nécessaire pour se protéger face à ces harceleurs qui se croyaient tout puissants.
UNE ABSENCE DE MEA CULPA
À ce jour, il n’y a toujours pas eu de réel mea culpa de la part des membres identifiés. Parmi eux, le rédacteur en chef des Inrocks David DOUCET, Alexandre HERVAUD journaliste de Libé, tout comme Vincent GLAD, Desgonzo, fondateur du site pornculture Le Tag Parfait. Tous profitent à l’heure actuelle d’une réputation progressiste, de gauche.
Pire encore, certaines personnes, comme certains articles publiés sur le sujet comme celui de Libé, remettent en cause les conséquences de ce harcèlement ciblé !
– voir les témoignages de piot qui étaient la première harpie harceleuse pour détruire les gens, sur les réseaux et dans la vraie vie (on se souvient de sa femme de ménage) ne m’aide pas à avoir de la sympathie pour elle
— Charlotte (@chamoi) 9 février 2019
Il est beau le journaliste modèle qui joue les exemples après s’être bien amusé au sein de meutes de harceleurs de féministes. Il est beau.
— Thømas Messias ™ (@thomas_messias) 5 février 2019
Assumer, reconnaître le mal fait, semble difficile à formuler pour certains, et les excuses tardent à venir. Peut être que d’autres suivront l’exemple de David DOUCET qui a publié aujourd’hui une lettre ouverte pour reconnaître ses actes et exprimer sa désolation… Un message accepté… Un luxe que certains racisés responsables de bad buzz, ces dernières années n’ont jamais eu.
Affaire à suivre …
EDIT: 20h23 Alexandre Hervaud et Vincent Glad, rédacteurs et pigistes à Libération, ont été mis à pied à titre conservatoire dans la matinée de lundi. Le site Brain Magazine a également annoncé la suspension de sa collaboration avec Vincent Glad.
Le studio de podcasts Nouvelles Ecoutes a de son côté mis fin à sa collaboration avec Guilhem Malissen. Stephen des Aulnois, rédacteur en chef et fondateur du magazine en ligne de la culture pornographique Le Tag Parfait a démissionné.
Léna P.