Né le 29 décembre 1923 dans le village de Caytou, au Sénégal, et décédé le 7 février 1986, Cheikh Anta Diop est perçu comme “l’historien africain le plus considérable de ce temps.”
Le titre complet de l’œuvre littéraire est NATIONS NÈGRES ET CULTURE : de l’antiquité nègre égyptienne aux problèmes culturels de l’Afrique Noire d’aujourd’hui, initialement parue en 1954 aux éditions Présence Africaine.
À travers les 2 préfaces (de 1954 et 1964), l’avant-propos, l’introduction, les 12 chapitres, les 54 illustrations et les notes terminologiques et biographiques, Cheikh Anta Diop nous fait découvrir l’Histoire de l’humanité et l’origine africaine de la civilisation humaine, avec un degré de connaissances remarquable, des références internationales diverses et variées et un argumentaire des plus structurés.
Dès la première de couverture, la parenté de l’Egyptien avec le Nubien est mise en évidence. En effet, l’Egypte, “berceau de la civilisation pendant 10 000 ans au moment où le reste du monde est plongé dans la barbarie” (p. 49), fût initialement peuplé de Nègres dont les ancêtres sont originaires de Nubie, région située au niveau de la vallée du Nil, au sud de l’Egypte et au nord de l’actuel Soudan. Sur cette couverture, le Nubien est comparé avec l’Indo-Europeen et le Semite.
Cheikh Anta Diop débute son ouvrage en définissant ce “qu’étaient les Égyptiens” et “le mythe du Nègre.” Il enchaîne avec la “falsification moderne de l’Histoire” concernant l’origine de la civilisation humaine et nous démontre par des arguments ethnologiques et linguistiques, l’origine Nègre de la race et de la civilisation égyptiennes. Dans la seconde partie, Cheikh Anta Diop partage son savoir linguistique en abordant le développement des langues nationales de chaque pays d’Afrique et réfute l’idée d’une langue africaine : “On pourrait objecter la multiplicité des langues en Afrique Noire. On oublie alors que l’Afrique est un continent, au même titre que l’Europe, l’Asie, l’Amérique ; or, sur aucun de ceux-ci l’unité linguistique n’est réalisée ; pourquoi serait-il nécessaire qu’elle le fût en Afrique? L’idée d’une langue africaine unique, parlée d’un bout à l’autre du continent, est inconcevable autant que l’est aujourd’hui celle d’une langue européenne unique.” (p. 405-406)
Il poursuit avec des traductions de concepts mathématiques, scientifiques, littéraires et poétiques, puis expose des comparaisons linguistiques et grammaticales du valaf, du sérère, du sarakollé et du baguirmien. Il énonce ensuite les problèmes de l’art africain : “L’art ne nourrit pas toujours son homme, encore moins en Afrique dans les circonstances actuelles ; il a manqué souvent à l’artiste africain un statut social digne de lui, des encouragements tels que prix d’art, lauréats, etc., des musées où il pourrait élargir le champ de son expérience, des expositions où il pourrait réaliser le contact avec le public, la possibilité de voyager souvent, des clubs, etc. En somme, il lui a manqué tout le luxe de son collègue occidental.” (p. 526)
Cheikh Anta Diop conclut cet ouvrage avec un chapitre sur la structure sociale et politique africaine, qui est le résultat des conditions économiques et matérielles du continent, en abordant l’impact négatif des systèmes de castes, les points faibles des deux systèmes de royauté appliqués, les trois catégories d’esclaves décelées, les conséquences sociales de la polygamie, la valeur morale de la générosité et “la vénération des vieillards et le respect des aînés.”
Pour terminer, en 1955, un an après la parution de la première édition de NATIONS NÈGRES ET CULTURE, Aimé Césaire qualifie ce livre du “plus audacieux qu’un Nègre ait jusqu’ici écrit et qui comptera à n’en pas douter dans le réveil de l’Afrique.”