sport

Sha’Carri Richardson : à la recherche du temps perdu

par Lilian

30 mai 2024

Sha’Carri Richardson concourant pour la Team USA lors des championnats du monde de Budapest, Photo : Shaun Botterill/Getty Images

La championne du monde du 100m en 2023, Sha’Carri Richardson, a fait sa rentrée sur les pistes en s’imposant sur le 100m, lors du Prefontaine Classic d’Eugene, le 25 Mai 2024. Cette course, qui compte pour la Ligue Diamant, épreuves de la Ligue Mondiale d’athlétisme, lance parfaitement la saison de cette athlète en la propulsant aux premières places des chronos mondiaux, à la recherche du temps perdu aussi bien sur les pistes que dans sa vie personnelle.

C’est le 25 Mai dernier, que la sprinteuse américaine, Sha’Carri Richardson, a commencé sa ruée vers l’or olympique. Après avoir conquis l’or mondial du 100m à Budapest l’année dernière, l’athlète américaine s’attaque au métal le plus précieux sur la distance reine, lors des Jeux Olympiques de Paris 2024. Celle-ci se présente comme la principale favorite sur le 100m, épreuve phare en athlétisme, aux JO 2024. 

En effet, Sha’Carri a réalisé un temps de 10’’83, lors de sa rentrée victorieuse à Eugene, qui la classe deuxième des bilans mondiaux sur la distance, alors que les très relevées sélections américaines (du 21 au 30 juin), qui qualifient les trois premiers ou premières de chaque épreuve pour les JO, se profilent. C’est dans cette même ville que la jeune américaine essayera de poursuivre son ascension vers les sommets pas toujours linéaires, pourtant annoncée dès son plus jeune âge.  

LIRE AUSSI : NAOMI OSAKA PARTICIPERA AUX CONFÉRENCES DE PRESSE LORS DES JEUX OLYMPIQUES DE TOKYO

Lors des championnats NCAA 2019 (National College Athletic Association), compétitions universitaires américaines, alors qu’elle n’a que 19 ans, Sha’Carri effectue un temps de 10’’75 qui explose le record du monde junior de 13 centièmes, détenu par l’allemande Marlies Göhr depuis 1977. Une performance qui la fera rentrer, par la même occasion, dans le top 10 des chronos les plus rapides de l’histoire du 100m féminin.

Sha’Carri réédite une performance presque similaire sur le 200m en terminant deuxième de sa course en 22’’17, et bat le record du monde junior détenu depuis 2004 par Allyson Felix. En 2021, année des Jeux Olympiques de Tokyo, elle reste sur sa lancée et devient la sixième meilleure performeuse de l’histoire avec un temps de 10’’72.

Avec un temps de 10”75, Sha’Carri devient recordwoman junior du 100m à 19 ans, lors des NCAA 2019. ©Kirby Lee/Image of Sport

Avec son ascension aussi fulgurante que sa foulée, la texane née à Dallas s’incarne comme l’héritière de la défunte recordwoman du monde, Florence Griffith-Joyner, que ce soit dans ses performances mais également dans le style. D’ailleurs, cette dernière ne cache pas le fait qu’elle s’est inspirée de « Flo-Jo », surnom de Florence Griffith-Joyner, pour créer son style, ornée de longs ongles et d’une longue chevelure colorée. Par ailleurs, elle signe en juin 2021, un contrat avec l’équipementier Nike et devient athlète professionnelle, signe d’un fort potentiel décelé chez la sprinteuse.

Une progression freinée par ses problèmes personnels

La jeune américaine à la vitesse est rattrapée par sa vie personnelle mouvementée. Après avoir remporté les sélections américaines qui lui ont valu une qualification aux Jeux Olympiques de Tokyo, elle avoue avoir consommer de la marijuana suite au décès de sa mère biologique et présente ses excuses dans la foulée. L’Étasunienne est automatiquement suspendue par le CIO, ce qui l’empêche de participer à ses premiers Jeux Olympiques, elle qui se présentait comme favorite de l’une des épreuves les plus importantes de l’évènement. 

LIRE AUSSI : MICHELLE ALOZIE, ESPOIR DU BALLON ROND NIGÉRIAN

Malgré cette mésaventure, Sha’Carri est soutenue par différentes personnalités américaines tels que l’ancien président des États-Unis, Barack Obama ou encore le basketteur Chris Paul. Et pour cause, élevée par sa tante et sa grand-mère, abandonnée par sa mère biologique, la sprinteuse se bat contre les traumas de son enfance. Au lycée, elle avouera même avoir fait une tentative de suicide. 

Jonathan Ferrey/Getty Image

De par son vécu, Sha’Carri Richardson se crée une personnalité. Son franc-parler suscite la controverse dans le monde de l’athlétisme, du sport et du circuit médiatique. Par exemple, lors du contrôle positif de la patineuse russe Kamila Valieva durant les Jeux Olympiques d’hiver en 2022, elle avait déploré sur le réseau social, X, anciennement Twitter, la différence de traitement :

« Peut-on avoir une réponse crédible sur la différence ? La seule que je vois est que je sois une femme noire ». 

Ce à quoi le CIO a répondu que la situation n’avait « rien à voir ». La texane est une femme engagée dans la communauté afro-américaine où elle n’hésite pas à repartager sur ses différents réseaux sociaux des posts retraçant l’histoire de sa communauté. 

« I’m not back, I’m best »

Après ses tourments de la vie, notamment en 2022, où Sha’Carri Richardson se sépare avec fracas de la sprinteuse jamaïcaine, Janeek Brown, elle essaye de renouer le fil de sa carrière sur les tartans. La sprinteuse décide alors de se plonger dans un profond mutisme médiatique, au début de l’année 2023, avant les « Monde » de Budapest, afin de se recentrer sur elle-même. 

En débarquant plus fraîche mentalement, la jeune femme survole les séries du 100m, lors des Mondiaux, mais se fait une frayeur durant les demi-finales, en ratant son départ qui lui permet, malgré tout, de se qualifier de justesse en finale. Elle s’imposera finalement, de belle manière, en finale avec son temps de 10’’65, records des championnats du monde. Elle déclarera au micro : « I’m not back, I’m best » (« Je ne suis pas de retour, je suis meilleure »), signe d’un nouveau départ dans la vie de l’athlète, plus déterminée que jamais. Elle terminera deuxième du 200m, qui confirmera, néanmoins, sa nouvelle place dans le gotha du sprint mondial et de l’athlétisme.

La nouvelle reine du sprint mondial a confirmé sa prise de maturité en ce début d’année, sur et en dehors des terrains, après toutes ses difficultés. Elle semble enfin prête à assumer son nouveau statut, prête à conquérir l’or à Paris. Et lorsque le « bolide » texan est lancé, ni la vie, ni le temps, ni ses adversaires ne peuvent la rattraper.

Sha’Carri Richardson, explosant sa joie après sa victoire sur le 100m, lors des championnats du monde de Budapest, ©Reuters