Sur les traces du Paris Noir avec Kévi Donat
Depuis 2013, le guide-conférencier Kévi Donat propose avec le Paris Noir, des visites inédites, consacrées à l’histoire des diaspora noires dans la capitale. Rencontre.
Le rendez-vous est pris au Panthéon à 15h30. C’est près de ce lieu riche historique que le guide Kévi Donat, accueille une quinzaine de personnes avides de découvrir la capitale parisienne sous un angle méconnu. « Avant, lorsque j’effectuais des visites guidées pour mes anciens employeurs, souvent les touristes étrangers s’étonnaient de voir autant de Noirs en France. À force d’entendre cela, j’ai commencé à me questionner sur la place des afrodescendants dans l’histoire de Paris. » raconte le jeune homme, originaire de la Martinique. Il décide en 2013 de créer Le Paris Noir : une visite sous l’angle des diasporas noires en France, proposée aux touristes comme aux parisiens. Les visiteurs arpentent le temps d’une après-midi, les rues de la capitale et y découvrent l’apport déterminant des personnalités noires.
Une visite à la fois contemporaine et historique
Divisées en deux parties, la visite guidée du Paris Noir s’articule sur les deux rives parisiennes. La Rive Droite porte davantage sur l’histoire contemporaine des Noirs de France en s’intéressant particulièrement à des endroits connus de des diasporas africaines tels que Barbès, la Goutte d’or ou Château d’eau. Vient ensuite la partie plus historique représentée par la Rive Gauche. Ici, on met en avant les figures noires importantes : celles qui ont eu un rôle dans la mise en place de droits pour les Noirs au XXe siècle ou celles qui ont impacté le monde de la littérature telles que les très engagés Frantz Fanon, Aimé Césaire ou encore Paulette Nardal. « Parfois, durant ma visite de la Rive gauche, il y a des passants curieux qui me demandent ce que je fais avec autant de personnes. Et lorsque je réponds que je raconte l’histoire des Noirs en France, nombreux sont surpris de savoir que l’identité des Noirs s’est aussi construite dans des quartiers plutôt chics de Paris », déclare, amusé, le guide du Paris Noir.
Le monde politique n’est pas en reste. On découvre également des figures parfois controversées comme Felix Eboué, Gaston Monnerville ou encore l’ancien gouverneur Victor Schoelcher, qui a rédigé le décret de l’abolition de l’esclavage. Lors de la visite, la plupart des participants ont été surpris d’apprendre l’existence d’une plaque commémorative pour l’abolition dans le Jardin du Luxembourg.
Questionner l’identité noire
Au vu du contexte actuel, une activité entre individus partageant la même couleur de peau ou opinion similaire est souvent perçue comme communautaire ou « woke », nouveau vocabulaire que la classe politique française s’est dernièrement accaparée. Mais ce débat n’intéresse pas le guide. Le Paris Noir n’a en réalité qu’un seul objectif : intéresser tous les publics à l’histoire inexplorée du Paris Noir. Le jeune homme, également co-fondateur du podcast Le tchip, veut montrer qu’il n’y a pas qu’une seule façon de penser l’identité noire. D’ailleurs, les chercheurs, historiens ou philosophes s’étant intéressés à ce sujet, n’ont pas tous partagé les mêmes idées. Cette dualité d’opinions, Kévi tente de la transmettre en demandant régulièrement l’avis des participants sur des sujets tels que l’impact, aujourd’hui remis en question, de Victor Schoelcher en Martinique.
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Un podcast Le Paris Noir pour prolonger l’expérience
Pour prolonger l’expérience Paris Noir, Kévi a mis en place un podcast. Il s’entretient longuement avec des personnalités publiques allant de Kevin Razy à Rokhaya Diallo, et prochainement Simone Schwarz-Bart, pour aborder d’autres thématiques, telles que la place de la femme noire dans le paysage médiatique ou encore les rapports entre les populations noires et arabes.
Kévi a par ailleurs un second projet qui porte sur le développement d’une « troisième rive » pour le Paris Noir qui s’intéressera entre autre aux élus noirs provenant des colonies françaises ou au Code Noir.
Collaboration avec Netflix
Pour la sortie du film événement Netflix “The Harder They Fall”, produit par Jay-Z, qui raconte l’histoire des cow-boys noirs effacés de l’histoire américaine. Le média Yard a imaginé pour la plateforme de streaming vidéo, une exposition intitulée « Lumières Noires » sur le parvis du Palais de Tokyo du 28 au 31 octobre 2021. Cette installation éphémère met en lumière des personnalités noires et françaises oubliées des livres d’histoire. Le guide-conférencier Kévi Donat a eu l’occasion de présenter à un parterre d’invités lors de l’inauguration, les sept personnalités figurant dans l’exposition. Des sœurs Nardal à Raoul Diagne en passant l’écrivain antillais René Maran, ces personnages historiques également abordés dans les visites du Paris Noir, ont participé via leur actions et œuvres au rayonnement de la France.
