Tolúlọpẹ́ Ògúnremí, fondatrice des Coders of Colour
À 13 ans, Tolúlọpẹ́ Ògúnrẹ̀mí a appris à coder par elle-même. Depuis, elle s’efforce d’accroître la diversité dans l’informatique au Royaume-Uni par le biais de son organisation à but non lucratif, Coders of Colour.
Tout au long de son parcours dans l’industrie de la tech, la présence de Tolúlọpẹ́ Ògúnrẹ̀mí a été remise en question. « Lors de mon tout premier cours d’informatique à l’université, quelqu’un est venu me demander si je savais que c’était un cours de programmation. Cela m’a immédiatement démoralisée », raconte la jeune femme âgée d’un vingtaine d’années.
Pour surmonter son sentiment de solitude, cette jeune diplômée en mathématiques et en informatique fonde Coders of Colour. Une initiative qui lui vaudra d’être reconnue par Forbes 30 Under 30 comme lauréate dans la catégorie « Impact social ». Sa mission est simple : rendre autonomes les jeunes noir.e.s. « L’expérience d’un adolescent noir ne devrait pas avoir à être celle où vous êtes toujours endurci par le monde » explique-t-elle.
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UNE DÉTERMINATION INÉBRANLABLE
Dès l’instant où Tolúlọpẹ́ a observé les couleurs de l’arrière-plan changer en naviguant sur le téléphone de ses parents, elle a attrapé le virus de la tech. Elle a pourtant dû lutter contre des parents nigérians qui préféraient une application plus traditionnelle de ses compétences en mathématiques, une carrière dans la comptabilité ou les statistiques.
À 13 ans, elle apprend à coder par elle-même sur CodeCademy. Avec HTML, CSS, JavaScript et Python en poche, elle part à la rencontre d’autres personnes, dans son domaine de prédilection. Mais lors de son deuxième hackathon national, elle a un réveil brutal : elle est la seule personne noire en vue. Soumise à un regard essentiellement blanc et masculin qui semble dire « Cette fille noire sait-elle pour quoi elle fait la queue ? ». Tolúlọpẹ́ réalise alors que ni les participants ni les mentors ne lui ressemblent.
UNE COMMUNAUTÉ POUR LA FUTURE GÉNÉRATION
En 2016, Tolúlọpẹ́ crée Coders of Colour, un safe space pour les jeunes noirs âgés de 11 à 25 ans qui s’intéressent à l’informatique. Grâce à des ateliers de codage et d’autres programmes, ils sont formés à l’apprentissage automatique, et au développement de sites web et d’applications mobiles. « Le moi de 13 ans aurait aimé un tel espace au sein duquel j’aurais bénéficié du mentorat et des conseils de personnes qui me ressemblaient. Un espace où je n’aurais pas eu à faire semblant, ou à faire attention à comment on me perçoit », décrit-elle.

À terme, la jeune femme espère faire de cette association à but non lucratif primée un vaste système de soutien pour les étudiants qui souhaitent faire carrière dans le domaine de l’informatique. « Je ne veux pas encourager un jeune de 14 ans à poursuivre des études en informatique pour ensuite perdre son élan et se démoraliser parce qu’il ne se sent pas à sa place », insiste Tolúlọpẹ́.
L’IMPORTANCE DES VISAGES NOIRS
Les manifestations de Black Lives Matter ont poussé les entreprises à créer davantage d’opportunités pour les minorités dans l’écosystème technologique européen. Pourtant, un rapport en 2020 sur l’état de la diversité et de l’inclusion dans l’industrie technologique en 2020 montre qu’environ 83 % de tous les fondateurs s’identifient comme blancs. Seuls 2 % s’identifient comme Afro-descendants. « Lorsque les équipes sont homogènes, il n’y a pas d’espace pour penser aux autres. Surtout quand l’homogénéité vient du fait d’être considéré comme la norme », précise Tolúlọpẹ́.

La présence d’une personne noire lors de la formation des modèles permettrait d’éviter les problèmes qui se posent aujourd’hui dans le domaine de la vision par ordinateur. « J’ai toujours considéré comme une victoire le fait de pouvoir monter dans l’EuroStar à la Gare du Nord sans avoir à faire contrôler physiquement ma carte d’identité. Trop souvent, la machine était incapable de faire correspondre mon visage à la photo d’identité ! Cela pose la question de la considération que ces chercheurs occidentaux ont pour le reste du monde dans les applications de leurs matériaux ».
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Retrouvez Tolúlọpẹ́ à Akwaaba Fest, le premier festival afro-caribéen de la technologie qui aura lieu à Paris, en 2021 (dates à venir).
*Photos via Tolúlọpẹ́ Ògúnremí,
